L’audio-naturaliste écoute la nature comme elle s'est développée dans le temps et au travers de l'évolution.

 

Son objectif en enregistrant, puis en diffusant auprès du public le résultat de ses découvertes est la mise en valeur esthétique et artistique des sons et ambiances avec un stricte minimum de transformation. Il ouvre nos oreilles sur une planète vivante qui chante de sa vie foisonnante.

 

Il est donc avant tout un témoin privilégié de l'ensemble de cette symphonie composée de la voix des animaux et du son des éléments qui forment les paysages  et les ambiances les plus sauvages de la Terre. Pour cette raison, la pratique de l'audio-naturalisme n'a pas à se classer dans un genre. L'évolution a généré tant de diversité du sonore sur notre planète qu'il n'est nullement nécessaire de la recomposer ou de la transformer mais simplement déjà de la découvrir comme une finalité.

 

Quelle définition peut-on donner d'un audio-naturaliste?

 

Depuis toujours, l'audio-naturaliste est appelé chasseur de sons en français, soundtraker en anglais. Comme le terme ne m'a jamais séduit et que le mot chasse me semble excessif et inapproprié à une discipline qui met en valeur le vivant, je me suis efforcé dans les années 2000 à trouver une définition à  mon activité pour nommer cette discipline qui existe pourtant depuis la création de l'enregistrement et même bien avant si on se réfère aux textes descriptifs de chants d'oiseaux par leur aspect esthétique dans la littérature ancienne .

J'emploie depuis le terme d'audio-naturaliste qui lie parfaitement les deux thèmes nécessaires à cette passion et à ce métier, l'audio et la nature, nomination reprise depuis par de nombreux autres passionnés de sons de la nature et c'est très bien pour la reconnaissance de cette discipline.

Il y a encore bien souvent une confusion normale pour le novice avec le bio-acousticien qui travail sur l'aspect comportemental et purement scientifique des sons de la nature. Les deux activités sont évidement complémentaires mais ont encore du mal actuellement à se côtoyer.

L'audio-naturaliste doit avoir bien sur une rigueur scientifique dans ses déterminations même si la matière sonore esthétique et artistique est avant tout sa recherche.

 

Ma propre définition de l'audio-naturalisme est la suivante:

 

Découverte et mise en valeur artistique

des sons et ambiances de la nature et du monde sauvage.

 

Comme pour les artistes travaillant sur l'image, la beauté d'un son, d'une ambiance ou d'un paysage naturel résulte d'un pur choix de l'audio-naturaliste et des circonstances parfois aléatoire de la captation.

 

A la base, la nature n'offre pas d'ambiances ou de moments linéaires c'est à dire égales en abondance et c'est à l'audio-naturaliste de chercher ce que j'appelle "le point sublime" qui sera un équilibre dans la future diffusion et partage avec l'auditeur.

 

L'harmonie sonore est rare et abondante à la fois pour qui sait écouter le monde sauvage, car dépendante d'un grand nombre de facteurs naturels et comportementaux (biologie des espèces, géologie, heure, saison, météo, milieu naturel, altitude, pays etc).

 

Normalement pour l'audio-naturaliste un beau son, une belle ambiance ne devrait pas être sujet à détermination systématique, "c'est beau, j'écoute, j'apprécie, j'enregistre". Mais l'humain étant une bête curieuse aura toujours envie de savoir, qu'est-ce que c'est ?, où est-ce que cela a été enregistré ?, comment avez-vous fait etc ?.

 

Une ambiance, un chant d'oiseau ou un paysage sonore naturel demande donc de l'audio-naturaliste, une quadruple compétence artistique et technique:

- Sélection d'un sujet, d'un thème, d'un lieu, une date ou un espace (et donc sa connaissance).

- Choix du système de captation microphonique et d'enregistrement

- Traitement des rushs et préparation en studio.

- Mise en valeur dans la diffusion par le choix du système de projection sonore.

 

Si le choix technique du système de captation et de diffusion est similaire aux divers formes de collectes artistiques sur le son et la musique, le choix des sujets, leur approche et la connaissance de la nature et de ses habitants sauvages restent une spécificité à l'audio-naturaliste qui malgré son approche artistique aura toujours besoin d'une connaissance approfondie dans la détermination et l'observation.

 

Une fois acquit ces compétences sur la richesse artistique des sons de la nature, le désir d'enregistrer ou de diffuser avec fidélité et qualité doit pouvoir faire apparaître à l'auditeur (sans qui ce travail n'aurait pas de sens) la beauté, l'étrangeté ou l'esthétisme des sons et ambiances de la nature dite "sauvage". 

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Je me permets ce texte car j'observe dans de nombreux sujets de discussion une déviance vers un amalgame entre les sons de la nature et des genres de collectes sonores artistiques et musicales qui mélangent musique composée, field-recording, électro-acoustique, performance, improvisation et autres.

 

Que ces mouvements s'inspirent et utilisent les sons de la nature ce n'est qu'une suite logique à la créativité de l'homme et cela est tout à fait normal et ouvre nos oreilles à de nouvelles créations, mais que l'homme classe et range les sons de la nature dans un sous-genre musical voire bruitage à utiliser parmi tant d'autres cela me semble incompréhensible et à la limite de l'irrespect pour tant de beauté.

 

Les sons et ambiances de la nature sont autre chose, qui se rapproche tant du plaisir d'écouter de la musique que je me permets de dire qu'il s'agit d'une autre musique, celle générée par le temps et la communauté du vivant de notre planète. Aujourd'hui, la description des sons de la nature est bien souvent à base de termes utilisés pour la musique alors qu'il me semble qu'une autre forme de description propre à cette matière serait la bienvenue.

 

Depuis quarante ans j'observe, je regarde, j'écoute, je m'initie à cet art du son sauvage, cela m'a introduit à une initiation du respect du vivant et de la beauté du paysage et du monde sauvage. Aujourd'hui il m'est bien difficile de comprendre qu'enregistrer un paysage avec un avion soit normal, qu'écouter une diffusion sonore dans la nature sous un casque soit une évolution logique, que les sons de la nature ne soient qu'une composante instrumentale d'une œuvre m'étonne, qu'écouter un chant d'oiseau hyper compressé sur un flashcode soit suffisante et je ne parle pas de ce brouillard sonore que je nomme en plaisantant le "SONOUILLARD"  qui doucement se repend sur la Terre et ferme tant de lieux à l'écoute du monde sauvage.

 

On me dit souvent c'est une logique de l'évolution, il faut vivre avec son temps. A cela j'argumente  que notre civilisation industrielle n'a que deux siècles et la musique de création humaine 20 000 ans. Qu'est-ce que ce temps comparé aux millions d'années d'évolution du paysage sonore et des sons de la nature.

 

L'initiation à l'audio-naturalisme est une porte qui s'ouvre vers le passé, le présent et le futur, une porte sur le temps et sur la découverte de l'être sauvage. Nos lois ne sont pas les mêmes, les nôtres sont faites pour le respect de l'individu et de la communauté humaine. Les lois de la nature régissent le temps et des millions d'espèces animales, donc n'essayons pas de comparer ou d'imposer mais vivons et écoutons ensemble cette nature qui régit la vie sur ce bout de caillou qui se promène dans l'univers.